Avec le temps, va, tout va bien…

« Avec le temps, va, tout s’en va. » Léo Ferré
Ce matin, je me suis réveillée avec les paroles de la chanson de Léo Ferré en tête. « Avec le temps, va, tout s’en va. » Cette chanson parle de lâcher-prise, d’accepter les choses, de reconstruction, après un choc psychologique.
Apprendre à faire son deuil
Aujourd’hui, j’aimerais vous parler de cette notion de faire son deuil, qui s’applique à tant d’étapes de vie : faire son deuil du décès d’un proche… mais aussi faire son deuil d’une relation après une rupture, de son activité (par exemple suite au départ à la retraite), de la fusion avec un enfant ou un parent (et « couper le cordon »), d’un objet auquel on est attaché, de la confiance envers quelqu’un, d’une maison que l’on a aimée, d’une amitié toxique, du départ de la maison de ses enfants, de son idéal, d’un licenciement, etc.
Laisser partir ce que l’on a aimé
Le point commun entre tous ces moments difficiles à vivre, c’est la notion de départ, de perte, face à une personne ou un objet que l’on a aimé (et que l’on aime encore), un départ douloureux (le mot « Deuil » vient du latin « Dolus » qui signifie Douleur) que l’on a l’impression de subir (même si parfois, dans certains cas, on l’a choisi), un départ qu’il faut apprendre à accepter ¹, car la vie continue. Il faut apprendre à vivre sans.
« C’est cela l’amour : laisser ceux qu’on aime s’en aller s’ils le souhaitent… justement parce qu’on les aime. » Joy369, dans son article : « Blessure d’amour ».
Voir aussi ¹ Laisser partir ce qui doit partir….
Les 5 étapes du deuil
Quel que soit l’objet de votre tristesse, la plupart du temps les 5 étapes du deuil, analysées par Elisabeth Kübler-Ross, s’appliquent :
« Le deuil est une réaction personnelle et collective qui peut varier en fonction des sentiments et des contextes. Cette réaction commence par le déni et se termine par une acceptation plus ou moins libérée du sentiment d’attachement qu’éprouvait l’endeuillé :
Choc, déni : cette courte phase du deuil survient lorsqu’on apprend la perte. La personne refuse d’y croire. C’est une période plus ou moins intense où les émotions semblent pratiquement absentes. La personne affectée peut s’évanouir et peut même vomir sans en être consciente. C’est en quittant ce court stade du deuil que la réalité de la perte s’installe.
Colère : phase caractérisée par un sentiment de colère face à la perte. La culpabilité peut s’installer dans certains cas. Période de questionnements.
Marchandage : phase faite de négociations, chantages…
Dépression : phase plus ou moins longue du processus de deuil qui est caractérisée par une grande tristesse, des remises en question, de la détresse. Les endeuillés dans cette phase ont parfois l’impression qu’ils ne termineront jamais leur deuil car ils ont vécu une grande gamme d’émotions et la tristesse est grande.
Acceptation : Dernière étape du deuil où l’endeuillé reprend du mieux. La réalité de la perte est beaucoup plus comprise et acceptée. L’endeuillé peut encore ressentir de la tristesse, mais il a retrouvé son plein fonctionnement. Il a aussi réorganisé sa vie en fonction de la perte. «
Faire son deuil de l’espérance
Mais pour que le processus de deuil fonctionne, il faut encore en avoir envie. Parfois, on bloque à l’étape « Marchandage », « Négociation », on croit encore que les choses peuvent changer, revenir à la normale, que tout peut revenir comme avant. Paradoxalement, de façon complètement irrationnelle, on n’a plus d’espoir, mais encore de l’espérance. Une sorte de Foi qui nous soutient et nous fait croire en l’Avenir. On attend une sorte de « miracle » qui remettrait les compteurs à zéro.
Faire son deuil d’un passé idéalisé
Mais ce n’est pas d’Avenir qu’il s’agit, c’est de Passé : on s’agrippe à ce Passé, c’est un véritable attachement qui nous tire en arrière. On l’idéalise, on souhaite parfois le revivre à tout prix. On pense que les choses vont être différentes, on a des attentes¹. Mais, comme me le disait très simplement Marie-France Ballet de Coquereaumont, « Si ça ne marche pas, ça ne marche pas. C’est comme se brûler à une flamme, remarquer la douleur, et y revenir en étant étonné d’être à nouveau brûlé ». Il faut apprendre à faire son deuil d’un passé idéalisé. A ne pas s’acharner.
Voir aussi ¹ Plusieurs étapes de l’évolution de la Conscience
Apprendre à être réaliste
On ne peut pas forcer les sentiments des autres. « Le coeur, quand ça bat plus, c’est pas la peine d’aller chercher plus loin, faut laisser faire et c’est très bien. » Léo Ferré. Je suis la première à prôner l’optimisme ¹ , mais à bon escient : parfois il faut aussi apprendre à être réaliste, à être raisonnable, à ne pas faire l’autruche sous le prétexte d’être confiant.
Voir aussi ¹ Ne pas être victime d’une victime
Apprendre à couper le cordon
Il faut parfois apprendre à tourner la page, à couper pour de bon le cordon qui nous relie de façon nostalgique au Passé et nous tire en arrière. C’est parfois le seul moyen d‘avancer, car on s’est enfin libéré d’une entrave ¹.
Plus facile à dire qu’à faire ? Pour s’aider, on peut faire une méditation, où, de façon très métaphorique, on visualise un cordon qui nous relie à notre source d’attachement. Sans le couper, ce qui serait à mon avis trop brutal, on peut s’imaginer le dénouer avec douceur et bienveillance, remercier la personne ou l’objet pour tout ce qu’il nous a apporté et tout l’amour partagé ², lui rendre sa part de cordon, « rembobiner » la nôtre, et le ou la laisser partir ³...
« De tout ton coeur, pardonne-lui, pardonne-toi, et lâche-le. Quand le karma d’une relation est terminé, seul l’amour demeure. C’est sans danger. Lâche prise. Quand le passé t’a enfin dépassée, lâche prise. Ensuite, redescends, et commence le reste de ta vie. Avec une immense allégresse. » Elizabeth Gilbert, Mange, Prie, Aime
Voir aussi ¹ Tomber sept fois, se relever huit ² De l’amour véritable et de la bienveillance ³ Dire l’essentiel à nos proches
Lâcher-prise, se « désagripper », laisser partir
Dans son livre « L’énergie et la sagesse du monde », Louise Gervais ¹ décrit la méthode de Levenson appelée « Release », qui consiste à identifier dans son corps un des 5 manques, désirs ou besoin auxquels on s’agrippe ² (manque ou désir d’approbation/amour, de contrôle, de sécurité, de séparation ou de fusion), à le reconnaître, puis à le relâcher en posant la question : « Est-ce que je peux lâcher mon agrippation ? ³ «
Voir aussi ¹ La thérapie de l’hibernation ² De l’excès à l’équilibre Traverser ses peurs ³ Ecouter son corps pour suivre son guide intérieur
Une méthode pour aider le processus : l’EMDR
Et quand c’est trop difficile, car le choc a été trop fort, quand les paroles et les images d’un traumatisme restent en tête, les thérapies peuvent soutenir la démarche de reconstruction et cicatrisation. Je pense en particulier à l’EMDR, que je n’ai pas testé directement moi-même mais dont j’ai eu des échos très positifs de la part d’amis.
De quoi s’agit-il ? EMDR : Eye Movement Desensitization and Reprocessing, ou désensibilisation et reprogrammation par des mouvements oculaires. Le principe : « Si un événement douloureux a été mal “digéré” parce que trop violent, explique le psychiatre David Servan-Schreiber, les images, les sons et les sensations liés à l’événement sont stockés dans le cerveau, prêts à se réactiver au moindre rappel du traumatisme. Le mouvement oculaire débloque l’information traumatique et réactive le système naturel de guérison du cerveau pour qu’il complète le travail. »
Avec le temps, va, tout s’en va
Et puis, bien sûr, le temps est le meilleur remède ¹, parfois le seul. On ne peut pas toujours forcer les choses, accélérer un processus qui demande par définition de la douceur et de la lenteur. Les psychologues disent souvent que pour un deuil suite à un décès d’un proche, un à deux ans sont nécessaires. Et pour les relations de couple, on parle souvent de la moitié du temps passé ensemble. (C’est bien sûr approximatif et il y a de très nombreuses exceptions, mais c’est pour donner un ordre de grandeur).
Pour finir, je vous laisse relire avec soin les paroles de la chanson de Léo Ferré, si justes et pleines de sens…
Voir aussi ¹ La théorie de la fraise
Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va
On oublie le visage et l’on oublie la voix
Le coeur, quand ça bat plus, c’est pas la peine d’aller
Chercher plus loin, faut laisser faire et c’est très bien
Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va
L’autre qu’on adorait, qu’on cherchait sous la pluie
L’autre qu’on devinait au détour d’un regard
Entre les mots, entre les lignes et sous le fard
D’un serment maquillé qui s’en va faire sa nuit
Avec le temps tout s’évanouit
Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va
Même les plus chouettes souvenirs ça t’as une de ces gueules
A la Galerie je farfouille dans les rayons de la mort
Le samedi soir quand la tendresse s’en va tout seule
Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va
L’autre à qui l’on croyait pour un rhume, pour un rien
L’autre à qui l’on donnait du vent et des bijoux
Pour qui l’on eût vendu son âme pour quelques sous
Devant quoi l’on se traînait comme traînent les chiens
Avec le temps, va, tout va bien
Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va
On oublie les passions et l’on oublie les voix
Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens
Ne rentre pas trop tard, surtout ne prends pas froid
Avec le temps…
Avec le temps, va, tout s’en va
Et l’on se sent blanchi comme un cheval fourbu
Et l’on se sent glacé dans un lit de hasard
Et l’on se sent tout seul peut-être mais peinard
Et l’on se sent floué par les années perdues
Alors vraiment
Avec le temps on n’aime plus.
Avec le temps, va, tout va bien…
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